Coucou Mireille,
Lorsqu’on s’est séparé dans la rue tu m’as dit que tu partais quelques jours en vacances. Je savais donc tu n’allais pas poster tout de suite. Je n’ai pas donné de version de ton « aventure » ou « mésaventure » car je voulais te laisser raconter ce qui t’était arrivée.
Nous avons été plusieurs à être témoins de toute l’hésitation qu’il y a eu à Trèbes au téléphone et sur place autour de ta poursuite ou non de la course. Mais le mal était déjà fait car en arrivant en voiture de l’écluse de l’Aiguille à 16 km de là, vous étiez, avec l’autre concurrent, considérés « hors course ». Comme tu l’as dit sur place : l’erreur a été de monter dans cette fichue voiture. Si vous étiez arrivés après 6h à Trèbes, en courant ou en marchant, le "hors-délai" aurait été pour vous deux plus facile à accepter. Alors fallait-il ou non vous laisser repartir de Trèbes ? Christian était à Toulouse au téléphone et Cécile était devant toi. Tu as tellement insisté que Cécile, un peu excédée il faut bien l’avouer, a fini par craquer et te dire que tu pouvais continuer, mais sans dossard. Christian, depuis Toulouse, est resté sur sa position de t’arrêter à Trèbes. Un peu comme un enfant face à ses deux parents qui ne sont pas d’accord sur la réponse à donner tu as pu profiter de leur faille et tu as fait, à ce moment-là, le choix de repartir. La position de Christian et Cécile a été très claire : tu étais considérée hors-délai et si tu continuais malgré tout ce serait sans dossard et sans classement à l’arrivée. Tu as insisté plusieurs fois sur l’idée que reprend Cloclo d’ailleurs dans son post à savoir que les barrières horaires ne doivent pas être anticipées. Je crois que c’est là qu’est l’erreur de l’organisation : avoir arrêté des concurrents avant la barrière horaire.
Je comprends qu’il ait été difficile d’arrêter à Trèbes. En étant arrivée en voiture du coup tu avais rattrapé du temps et tu retrouvais plusieurs coureurs qui étaient arrivés avant toi, dans les délais, et eux allaient pouvoir repartir alors pourquoi pas toi… Tu te sentais bien et tu avais des suiveurs vélo près à continuer. Je sais que tu n’as pas demandé à être amenée en voiture à Trèbes. J’imagine bien que tu voulais terminer cette course dans les 48h, passer la barrière horaire de Trèbes et il n’est jamais amusant de se faire arrêter quand on sait qu’on peut aller au bout. Mais au-delà de l’émotionnel il y a aussi la réalité des chiffres et du règlement. La barrière horaire à Trèbes était à 6h du matin, soit 20h de course. Vous avez été arrêtés au km 108, après 18h15 de course, soit une moyenne d’environ 6 km/h. Il vous restait 16 km à parcourir jusqu’à Trèbes en 1h45’. Etait-ce réalisable… Ne peut-on pas penser qu’à l’écluse de l’Aiguille, l’organisation a décidé "d’épargner" à ceux qui étaient là ces 16 km restants qu’ils allaient faire, d'après eux, "pour rien" et par la même permettre aussi aux bénévoles de quitter ce poste de ravitaillement. A la décharge des bénévoles, ils étaient peu nombreux et certains quittaient un poste pour en rejoindre un autre ou être à l’arrivée à Toulouse à décharger les sacs des concurrents, mettre en place les tables, chaises, frigos…
Je crois que sur des épreuves comme celles-là, au bout d’un certain nombre d’heures, tout le monde est fatigué et un peu à cran : les coureurs, les bénévoles, les organisateurs. Il faut un peu d’empathie les uns envers les autres. Avec la fatigue certaines réactions s’expliquent. Je ne dis pas qu’elles s’excusent mais elles s’expliquent.
Les organisateurs, malgré ce qu’ils avaient dit, ont continué à suivre ta progression et à ne pas te laisser sans surveillance sur le parcours. Tu as été un peu comme un skieur qui fait du « hors-piste ».
Pour ce qui est de l’arrivée, je voudrais juste te dire que ça ressemblait beaucoup aux arrivées de la TranseGaule que j’ai pu voir l’an dernier. Il y avait certes 2 journalistes à l’arrivée des premiers (VO2Mag et RunningMag) mais le reste des personnes présentes n’était autre que les familles des concurrents attendus et 4 ou 5 bénévoles. Il suffit de regarder les photos prises et la vidéo de Vincent. Sylvie a fini 4ème au scrach et 1ère féminine. Regarde la vidéo de Vincent et tu verras qu’il n’y a pas foule pour l’accueillir. Susan est arrivée vers 6h du matin en plein anonymat aussi. Je suppose que Devegan pourrait dire la même chose. Il n’y a jamais eu de spectateur, pour personne, pas même les premiers. Tous les concurrents ont été logés à la même enseigne. C’est ce type de course qui veut ça je pense. Les arrivées sont tellement échelonnées… Pour répondre à Dio, il n’y avait ni ligne d’arrivée tracée au sol, ni arche, ni pour les premiers, ni pour les derniers. Rien n’a été enlevé entre l’arrivée du premier et l’arrivée du dernier puisque le repas du samedi midi se faisait au même endroit. La zone d’arrivée a été identique pour tous les coureurs, les premiers comme les derniers.
Cloclo, je ne pense pas que ce soit une course élitiste. 240 km divisés par 48h ça fait une vitesse constante de 5 km/h. En tenant compte des arrêts pour manger ou dormir un peu, peut-on parler d’élitisme lorsqu’il s’agit de courir à une vitesse comprise entre 5 et 9 km/h ? Par contre il faut avoir de réelles qualités d’endurance et de gestion du sommeil, c’est incontestable. Et je ne parle pas de faire un classement mais juste de terminer la course dans les délais. Il est évident que les erreurs de parcours ont fait perdre un temps précieux aux coureurs qui étaient proches des barrières horaires.
Mireille, je t’ai manquée de peu à l’arrivée. Quand j’ai trouvé Jean-Pierre (Devegan) à 9h du matin il m’a dit « je suis le dernier de la course mais j’ai fini ». Je suis restée quelques minutes encore puis je me suis dit que s’il était le dernier, personne d’autre n’arriverait et je suis retournée retrouver mes amis chez l’hôte qui nous avait prêté sa douche en attendant midi et le repas. Tu es arrivée à 9h30… juste après mon départ. Samedi midi, nous étions à la même table pour le repas, nous avons donc du entendre la même chose. Christian s’est excusé (même si c’était trop tard et si cela ne changeait rien bien sûr) des problèmes d’organisation qu’il avait pu y avoir et il a dit qu’il endossait entièrement la responsabilité de toutes les erreurs qui avaient pu être commises, qu’il ne se défaussait pas. Il a évoqué également l’erreur commise en rapatriant les deux coureurs en voiture à Trèbes avant la barrière horaire.
Je trouve que ta mésaventure relance la question des barrières horaires. J’ai vécu la sentence de ces barrières à la Trail Blanch à Font-Romeu en janvier. Je sais ce que ça fait et ce que l’on ressent. Mais après-coup je m’étais posé une question : faut-il resserrer les barrières pour ne laisser qu’un certain nombre de sportifs accéder à ces courses ou au contraire faut-il les allonger pour permettre à un maximum de personnes d’y participer, en demandant ainsi un peu égoïstement à des bénévoles de passer des heures au bord de la route à nous attendre ? Je pense qu’il y a suffisamment de courses organisées pour que chacun de nous y trouve son bonheur, suivant son niveau. Je sais que je ne participerai jamais à certaines courses, c’est comme ça. Elles ne sont pas de mon niveau ou je ne suis pas du leur. Mais il y a aussi plein d’autres courses magnifiques qui me tendent les bras… Il y a plein de courses qui te tendent les bras à toi aussi Mireille. Et pourquoi pas l’Intégrale de Riquet l’an prochain, avec un road-book plus détaillé qui évitera les erreurs de parcours et les pertes de temps qui font passer ces fichues barrières horaires.
J’espère que les quelques jours de vacances après la course t’ont permis de récupérer et de te reposer.
Encore BRAVO pour ta course, ta détermination, ton endurance, ta ténacité.
A bientôt sur une course. Peut-être se retrouvera-t-on sur un 24h prochainement.
